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28 juillet 2006 – L’été tire à sa fin. Vite! Afin de profiter une dernière fois de votre nouvelle piscine, vous invitez vos amis à une petite fête en leur disant d’apporter leurs boissons favorites. Mais qu’en sera-t-il de votre responsabilité si un de vos invités devait quitter la fête en état d’ébriété et blesser un tiers? La Cour suprême du Canada s’est penchée sur cette question dans l’affaire Childs c. Desormeaux dont le jugement fut rendu le 5 mai 2006.
Les faits
Afin de célébrer le Jour de l’An 1999, Julie Zimmerman et Dwight Courrier décident d’organiser une petite soirée lors de laquelle chacun des invités doit apporter sa propre boisson. Monsieur Desmond Desormeaux, alors reconnu comme étant un grand buveur, est au nombre des invités. Le soir venu, M. Desormeaux a consommé environ 12 bières en 2 ½ heures et son taux d’alcoolémie atteint un niveau 3 fois supérieur à la limite permise par la Loi.
À la suite d’une querelle avec un autre invité, M. Desormeaux décide de quitter les lieux au volant de sa voiture. Compte tenu de son état d’ébriété avancée, il engage sa voiture dans la voie réservée aux véhicules en sens inverse et heurte de plein fouet un véhicule occupé par 4 passagers, dont un est tué sur-le-champ et 3 autres grièvement blessés. Madame Zoe Childs, appelante dans le présent dossier, est paralysée de la taille jusqu’aux pieds depuis cet accident suite au sectionnement de sa colonne vertébrale.
M. Desormeaux a plaidé coupable à une série d’accusations criminelles découlant de ces événements et a été condamné à 10 ans d’emprisonnement. Comme ce dernier n’avait souscrit à aucune assurance et ne possédait que peu d’actifs, Mme Childs a décidé d’intenter une poursuite contre les hôtes de la soirée afin d’obtenir réparation pour ses blessures.
En première instance
Le juge de première instance a conclu qu’une personne raisonnable, placée dans la situation des hôtes, M. Courrier et Mme Zimmerman, aurait dû prévoir que M. Desormeaux risquait de provoquer un accident et/ou de blesser quelqu’un. Cependant, l’obligation de diligence ainsi créée se devait d’être écartée par des considérations sociales et juridiques quant à l’imposition aux hôtes sociaux d’une obligation de diligence envers les tiers blessés par leurs invités, quant à la réglementation gouvernementale en matière de vente et de consommation d’alcool, et sur la base du fait qu’une solution législative aurait été préférable à une solution judiciaire. Le juge a donc rejeté l’action.
La Cour d’appel
Selon la Cour d’appel de l’Ontario, les circonstances ne révèlent même pas l’existence d’une obligation de diligence. Contrairement aux hôtes commerciaux, la Loi n’impose aucune obligation de surveillance aux hôtes sociaux quant à la consommation d’alcool et personne ne s’attend à ce qu’ils le fassent. Donc, à moins qu’ils n’aient participé activement à la création du risque ayant engendré l’accident, les hôtes sociaux ne peuvent être tenus responsables envers les tiers usagers de la route. La Cour d’appel a ainsi rejeté l’appel de Mme Childs.
La Cour suprême du Canada
Mme Childs a interjeté appel devant la Cour suprême du Canada afin que cette dernière détermine si, au Canada, les hôtes sociaux qui invitent des gens à une soirée où l’on sert de l’alcool ont une obligation légale de diligence envers les tiers qui peuvent être blessés par lesdits invités en état d’ébriété.
La Cour suprême commence son analyse en se demandant si une telle obligation a été reconnue dans une affaire semblable. Faisant le lien avec la responsabilité imposée aux restaurateurs et aux tenanciers de bars, la Cour suprême s’interroge à savoir si l’obligation de diligence imposée aux fournisseurs d’alcool commerciaux trouvait application dans le cas des hôtes sociaux. La Cour répond à cette question par la négative pour les trois (3) raisons suivantes :
La Cour suprême conclut donc que l’obligation invoquée, si elle existe, se doit d’être nouvelle.
Pour qu’une telle obligation soit imposée aux hôtes sociaux, la partie demanderesse doit établir un lien suffisamment étroit entre les hôtes sociaux et les tiers usagers de la route ou un rapport de proximité justifiant l’imposition d’une telle obligation de diligence. La Cour suprême vient à la conclusion que les faits de l’instance ne permettent pas d’établir un tel lien faisant ainsi naître l’obligation de diligence. En effet, en l’absence d’un acte manifeste ou d’une participation active à la création du risque par les hôtes, par exemple en organisant un concours de cul sec, il faut satisfaire aux critères de la prévisibilité du préjudice. Or, les blessures causées à Mme Childs n’étaient pas raisonnablement prévisibles et, si tel avait été le cas, le défaut d’agir ou l’inaction dans les circonstances ne suffit pas à imputer aux intimés une telle responsabilité.
Le fait d’organiser une soirée où l’on sert de l’alcool ne suffit pas à établir la participation de l’hôte à la création ou à l’aggravation du risque. De plus, le principe de l’autonomie individuelle impute à la personne qui consomme la responsabilité de ses choix personnels.
Enfin, on a également soulevé le facteur de la confiance raisonnable pour en conclure que les invités ne se fiaient aucunement à l’hôte pour surveiller leur consommation d’alcool. Puisque l’existence d’une obligation de diligence n’a pas été établie, la Cour estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner les considérations sociales et juridiques étudiées en première instance. La Cour suprême a donc rejeté le pourvoi.
Les répercussions au Québec
D’emblée, il faut savoir que le Régime d’assurance automobile du Québec est obligatoire et empêche toute poursuite pour dommages au civil intentée contre le conducteur ivre et, par le fait même contre les hôtes, en cas d’accident de la route. Mais qu’en serait-il si la consommation d’alcool lors d’une petite soirée menait à un autre type d’accident, par exemple, un accident de traîneau ou bien, plus simplement, une bagarre? Il faudrait tout d’abord se tourner vers le Code civil du Québec qui impose, selon l’article 1457, une obligation générale à chaque personne de respecter les règles de conduite qui, selon les circonstances, s’imposent à elle, de manière à ne pas causer préjudice à autrui.
Si on ajoute à ceci la possibilité d’appliquer l’article 2 de la Charte des droits et libertés de la personne qui impose a toute personne l’obligation de porter secours à quiconque voit sa vie mise en péril, il est possible d’avoir quelques réserves sur la portée de ce jugement au Québec.
Somme toute, il importe de toujours être prudent lorsque l’on prépare une petite soirée arrosée. Ainsi, peu importe l’impact que cette récente décision aura en droit québécois, pourquoi attendre l’intervention du législateur ou des tribunaux et ne pas prendre les devants en agissant en personne raisonnable. Votre conscience s’en portera toujours mieux!
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